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ÉDITO

 Si on compare les chiffres nets de fréquentation des lieux culturels en 2019 et 2022, et exception faite de quelques rares acteurs privilégiés, on prend conscience de la catastrophe qu’a été la pandémie dans le domaine de la Culture, au même titre qu’elle le fut sur le plan sanitaire et économique.

Les restrictions et les annulations derrière nous, on serait en droit de penser que tout va redevenir comme « avant ». Force est de constater que malgré la levée des mesures de distanciation et des gestes barrière, la reprise est lente et poussive ! Quelques « carton plein » sur les six premiers mois de la saison, mais des statistiques globales en deçà des espérances.

Pour moi, il faut y voir un effet délétère de plus de cette épidémie : une modification inconsciente, non anticipée, mais profonde, de notre mode de relation à l’autre. Perdue, l’habitude de se retrouver au théâtre, au concert, au musée, également oubliées les discussions du « café du commerce », les cancans autour de le « machine à café » au boulot, les rassemblements au stade ou dans les lieux de culte.

Changement de paradigme. On délaisse la Culture collective, celle qui est l’expression d’un mode de vie, d’un héritage commun, d’une langue, d’une cuisine, au profit d’une Culture individuelle, faite d’expérience solitaire de l’approche et l’appropriation des arts, des techniques, de tout ce qui construit notre  quotidien, dans lequel le lien à autrui est défait. Déjà en 1991, Jean-Louis MURAT, qui vient de nous quitter, chantait :

« Et l’on se croit d’amour, Et l’on se croit féroce, enraciné, mais revient toujours, Le temps du lien défait »

Quelle part aussi donner à cette immédiateté de l’information, qui conduit à la perte de l’esprit critique, à la négligence de l’analyse des preuves ? Un fossé de plus en plus large et profond se creuse entre la science et la culture, avec la disparition des repères, des lois et des normes. Ce faisant, la place est libre pour tous ceux qui ont bien compris qu’au fond de chacune ou chacun réside le germe du besoin de référence collective, d’appartenance au groupe, d’identification à une figure archétypale ou expression d’un inconscient collectif, notions développées par Carl Gustav Jung. C’est ce genre de comportement égocentré et irresponsable qui a fait naître les astrologues et gourous en tous genres, générant tout un univers de sectes.

Décollons le nez de la vitre, prenons de la hauteur. Redécouvrons les fondements de notre société, échangeons, partageons, confrontons nous s’il le faut ! Rassemblons ce qui est épars et enrichissons-nous de nos différences. Un beau programme, en vérité …